Notice

Le gouverneur général de l’Algérie s’inquiète de se trouver sans pouvoir de contrôle sur les enseignants en Algérie, au profit du recteur de l’Académie.

Le document est conservé aux Archives Nationales d’Outre-Mer à la cote 81 F 1719.

Lettre du 13 novembre 1940 du ministre secrétaire d’État à l’Intérieur au secrétaire d’État à l’instruction publique

J’ai l’honneur d’appeler votre attention sur les inconvénients très sérieux que présente en Algérie l’application de l’article 68 de la loi du 30 octobre 1886 sur l’organisation de l’enseignement primaire et les articles 41 et 42 du décret du 18 octobre 1892 sur l’enseignement des indigènes. Ces textes privent le Gouverneur Général de tout moyen de contrôle sur le personnel de l’enseignement primaire dans les territoires qu’il administre.

Les attributions des préfets dans la métropole sont, en effet, dévolues en Algérie au Recteur de l’Académie (nominations, déplacements, discipline). Le droit de regard du Gouverneur Général se trouve ainsi limité aux attributions de surveillance qu’il détient du décret du 21 février 1936 et de l’article 43 du décret du 18 octobre 1892 pour l’enseignement indigène, ce qui revient pratiquement à donner en cette matière au Gouverneur Général des prérogatives moins étendues que celles reconnues aux préfets métropolitains.

Cette anomalie était déjà apparue lors de l’élaboration du décret du 30 octobre 1935 qui avait placé tous les services civils sans exception sous la haute direction du Gouverneur général.

Mais ce texte, pour des raisons qui ne sauraient valoir à l’heure actuelle, ne fut maintenu que 4 mois et le problème demeure entier.

Cependant, les inconvénients déjà signalés dans les années qui ont précédé n’ont fait que s’accroître et il est absolument indispensable – à l’heure où l’on prend en considération le rôle primordial que doit jouer l’instituteur dans l’œuvre de régénération sociale de la Nation – qu’une surveillance très étroite soit exercée sur l’activité extra scolaire du personnel enseignant, son attitude politique et sa manière de servir en général.

Il ne s’agit pas de créer, au profit du Gouverneur général de l’Algérie, un privilège législatif susceptible de porter atteinte au principe de l’unité d’enseignement qui domine l’organisation scolaire métropolitaine et algérienne, mais seulement de lui reconnaitre des possibilités d’action identique à celles des préfets en France métropolitaine. L’action disciplinaire, notamment, n’appartient qu’au recteur de l’académie d’Alger, qui, comme il est naturel, est conduit à n’envisager la manière de servir des agents placés sous ses ordres que sous l’angle pédagogique qui demeure son domaine. Il s’ensuit que, le plus souvent, des instituteurs, remplissant convenablement leurs obligations d’enseignement, ont pu jusqu’à ce jour avoir une conduite politique néfaste, sans que l’autorité académique, dont ce n’était d’ailleurs pas le rôle, se soit cru obligé de servir.

Je vous serais donc obligé de vouloir bien – en raison de l’intérêt qu’il y aurait à ce que la réforme fut accomplie avant la prise de fonctions du nouveau recteur me faire connaître d’extrême urgence si le projet de loi ci-joint, destiné à rétablir cette situation, ne soulève pas d’objection de votre part.

J’ajoute que la faculté qui est laissée au Gouverneur général par ce texte, de déléguer, en tout ou en partie, au Recteur, les pouvoirs qui lui seraient conférés, est de nature à maintenir au Chef de l’Université d’Algérie toute liberté d’action dans le domaine technique.